Après l’obtention laborieuse de mon visa pour le Congo, je peux me remettre en route. C’est même une obligation si je veux tenir les délais que je me suis fixés. Je laisse alors Entebbe et l’Ouganda derrière moi. Je remercie les personnes qui se sont occupées de moi cette dernière semaine, après que le reste de la famille soit partie pour Kigali. Shafiq et Jacques ont été une très bonne compagnie, et rester en petit comité m’a permis d’apprendre beaucoup de choses. En effet j’ai pris un peu de temps pour sortir de la maison, visiter les rives du lac Victoria et l’endroit magnifique qu’est Entebbe. J’ai aussi appris à me débrouiller plus par moi-même, durant mes multiples voyages à Kampala, la capitale du pays. Les bus entre ces deux villes n’ont plus de secrets pour moi.
Les cars de jour pour le Rwanda étant complets en ces jours de fêtes, je réserve une place dans un bus de nuit. Je partirai donc le 23 décembre à vingt heure, sur le siège numéro 52. Lorsque j’arrive accompagné de mon ami Jean-Claude, je monte dans le bus à la recherche de ma place. Le seul problème est que le bus n’en comporte que 50… Je m’approche donc d’un employé de la compagnie de bus pour lui exposer mon problème ; par chance, il reste un siège sur lequel je pourrai voyager. Je suis prêt à passer cette longue nuit de somnolence. Le passage de la frontière se fait à quatre heure du matin, dans la brume glaciale des montagnes du Rwanda. Le poste frontière de Katuna est situé à près de deux-milles mètres d’altitude, tout près de fameux volcans et des derniers gorilles. Par chance, j’ai pris une chemise et un coupe-vent, qui m’éviteront l’hypothermie. Pour la première fois depuis longtemps, j’ai l’impression d’être en hiver.
Je fais aussi connaissance avec le strict Rwanda. Tous les bus sont vidés, les sacs ouverts afin de vérifier ce que les passagers transportent. A six heure trente, nous reprenons la route. Le soleil se lève au moment où nous commençons à nous faufiler entre les collines. Lorsque le soleil commence à poindre et éclaire les collines rwandaises, la nostalgie m’envahie peu à peu. J’ai l’impression d’être envoyé sept ans en arrière, lors de ma seconde visite au Burundi. Les paysages sont si proches, les maisons, les rizières et les plantations de thés sont presque semblables. Je suis dans le pays frère de celui qui m’a fait aimer l’Afrique, pour la première fois. Alors que je somnole après cette longue nuit, je me perds entre mes souvenirs et mes attentes pour cette nouvelle étape.
On rejoint Kigali à huit heure, après treize heures de voyage. Par chance, mon ami Evode m’attend à la station de bus. De retour du Sud-Soudan, ou il travaille, il reste quelques temps dans son pays d’origine pour passer du temps en famille. Il m’amène à l’hôtel où ils ont pris leurs quartiers. Je suis étonné de voir que tous les motards portent un casque, mais aussi qu’ils en ont tous un second à donner à leur passager. Evode m’expliquera que le gouvernement rwandais a réussi à imposer cette règle sur l’ensemble du pays. La moto est un des moyens de transport urbain les plus courant dans cette partie du monde. Après ce que j’ai vu au Kenya et en Ouganda, le respect de cette obligation me paraît une vraie prouesse. De plus, les rues sont propres, il n’y a presque pas de déchets. Cela me parait encore plus improbable que le port du casque. En effet, le gouvernement réprime fortement la mauvaise gestion des déchets. Même les sacs plastiques, qui sont un vrai fléau pour l’environnement, sont interdis sur le territoire. J’en avais deux en arrivant, mais ils m’ont été confisqués à la frontière.
Tout ce qui n’est pas contrôlé par le politique me fait penser au Burundi. Même si je ne suis pas là depuis longtemps, la proximité de ces deux pays est frappante. La culture, la langue, tout est si proche. Même la manière particulière de serrer la main est la même. La main gauche vient toucher le coude du bras droit, tandis que la tête s’incline respectueusement. Amakuru mes amis. Je ne suis jamais senti si proche du Burundi et même si les derniers événements politiques m’en ont fermé les portes, je suis vraiment ému de revenir si près. Presque un retour au point de départ.