Galerie Congo

Galerie Congo

La sainte coloc’

Birindwa au travail

Adrien

La place de l’indépendance, qui est aussi le seul rond-point de la ville. La police ce poste la pour prévenir les émeutes attendue lors de la fin du mandat du président

Birindwa portant l’un des maillots les plus mythique pour un neuchâtelois

Emportée par la pluie, la route s’était transformée en rivière

Un pont effondré, plus petit que l’écartement des roues d’une voiture

Les pêcheurs partent pour une longue nuit


Un repas congolais, devant une vielle carte du pays

Je vous la remet parce que je l’adore

Avec les sœurs Mirabilis et Pilar, les musungu les plus congolaises de la région

Très étonnant…
de voir une photo de son petit frère sans une école congolaise

Paul a gardé sa gestuelle liée à l’Amstel

Dans la pirogue pour Kasihe

Le regard joyeux de Moise, un petit gars atteint de handicap

Qui aime bien mes cheveux

Avec les enfants handicapé dans le besoin à Heri Kwetu


Une salle d’opération

Des amis/partenaires qui lancent un hôpital de quartier

Bukavu bel exemple d’urbanisation sauvage

Bonus :

Et un dindon offert pour nous remercier

Galerie des prisons

Kabare, le foot est un échappatoire à la faim
La tentative d’évasion
Une cellule vide, à Kabare
Le regard vide…
La jeune prisonnière
Dr. Claude, Dr. Didier et Da Vero
Photo d’équipe avec le « comité FIFA », qui gère le foot à la prison centrale. Le capita et son second sont aussi là
Le terrain coupe la petite cour en deux, possibilité de traverser qu’à la mi-temps
Le grand capita remet les prix aux meilleures équipes
État des lieux
Voilà le dernier article concernant les prisons. C’était toujours dur, mais tellement intéressant.. 

Il n’y a que peu de photos des endroits, je m’en excuse, mais j’ai décidé de respecter la dignité des détenus. Même si l’utilisation des images aurait pu potentiellement avoir un impact pour eux, il n’était impossible de capturer ces gens croupissant dans les cellules. Je pense qu’il était mieux ainsi. 

Sinon, je ne pensais pas que l’article sur Kabare allait avoir un impact pareil, vous êtes prêt de 500 à l’avoir lu jusqu’à maintenant. J’espère ne pas vous avoir foutu le cafard, mais je devais parler de cet endroit. C’est une leçon de vie, et d’après les retours que j’ai eu, beaucoup l’ont aussi vécu comme cela. 

La suite sera plus gaie, car j’ai retrouvé ma chérie au Rwanda et nous allons traverser la Tanzanie ensemble. C’est sa première fois en Afrique et même hors d’Europe ! Comme elle travaille avec moi sur ce blog depuis le début, en corrigeant mes textes, on a décidé qu’elle écrirait aussi quelques textes. Un regard complètement neuf ne peut pas faire de mal pour soulever ce que je ne vois plus! 

Merci pour tout et hésitez pas à me dire si vous avez des conseils, idées pour enrichir ce que j’essaye de partager ici. 

À bientôt pour la suite ! 

Thib 

La prison modèle

La prison modèle

Pour mon dernier week-end au Congo, nous avons dû annuler notre programme maman et moi. J’avoue que même si je rate un passage dans les montagnes et un aperçu des mines de la région, je suis content de rester à Bukavu pour terminer mon séjour. En effet, nous avons changé nos plans, épuisés par ces derniers jours plus qu’intenses. Mais malgré tout, j’ai tenu à retourner à la prison centrale. J’y avais déjà fait un saut il y a quelques jours, car nous étions invités pour assister à la finale du tournoi de la prison, qui a lieu grâce au matériel que « Un Seul But » leur fournit. Mais je n’avais toutefois pas eu le temps de « visiter » l’endroit. Ainsi, lorsqu’Adrien nous a proposé de venir assister à la messe, nous avons tous de suite accepté.

En arrivant, nous sommes accueillis par Adrien. Le directeur arrive ensuite, l’air un peu préoccupé. Il annonce à Adrien une triste nouvelle. Un des prisonniers, pris de violentes diahrrées, est décédé pendant la nuit. Le chef de l’établissement s’étonne car trois médicaments lui avaient été administrés la veille. Il avait eu droit à cette faveur. D’ailleurs, l’odeur de merde est insoutenable. La maladie menace chacun des prisonniers, prête à emporter chacun des 1’500 hommes qui croupissent là les uns sur les autres. Nous entrons ensuite dans l’enceinte, pas plus grande que la cour de mon ancien lycée, puis dans la petite chapelle. Adrien commence la messe, quand je remarque que le « Grand Capita » se trouve tout près de moi. Cet ancien gradé de l’armée, dont le visage est taillé au couteau, fait respecter sa loi ici. 150 hommes sont à son service, toujours armé d’un bâton comme matraque. Avec ma mère et moi, il est très courtois, même protecteur. Durant la messe, il m’adresse un grand sourire et un regard respectueux. Il est ici car durant ces années dans l’armée, il était partisan d’une des armes de guerres les plus violentes et meurtrière dans la région : le viol. Je n’en sais pas plus. Mais il est, d’après ce que j’ai compris, apprécié par la majorité des détenus et les membres de l’aumônerie. Il a, par exemple, mis un terme aux tortures qui avaient lieu contre ceux qui défiait son prédécesseur. La manière la plus utilisée ici était de leur briser les pieds, réduire leurs os en petits morceaux. L’espoir des torturés de remarcher était alors aussi fin que leurs os brisés, infime. La loi de la jungle règne ici, alimentée par la barbarie des milices qui sévissaient dans la région.

Durant la messe, le cœur chante à tue-tête devant une assemblée qui, comme leurs camarades de Kabare, a le regard vide. Mais eux ce n’est pas la nourriture qui leur manque, mais l’espoir. Ils en trouvent un peu dans la religion, mais elle ne peut pas tout combler. Mais le rythme des chants et des tambours leurs permet de s’évader quelques instants, même de danser un peu et taper dans leurs mains. La religion leur permet aussi peut-être de chercher un pardon, une rédemption.

A la sortie de la messe, mon ami, le docteur Claude, me prend par la main. Nous partons visiter l’enceinte. Je mets quelques instants à remarquer que nous sommes entourés, escortés par des miliciens, leurs pieds-de-biches au poing. Nous faisons le tour de l’établissement, entrons dans les cellules. La première que nous visitons est la cellule huit, divisée en petites chambres. Elle est réservée aux gens qui ont du pouvoir, leur donnant la chance d’avoir une chambre pour deux, avec une télévision satellite et un matelas. Les cellules suivantes sont comparables à celle que j’ai vu à Kabare sauf que là, une seule cellule contient autant de détenus que dans l’autre prison. Ils s’entassent à minimum 220 dans un espace d’environ quinze mètres sur huit. Quelques lits superposés, dépourvus de matelas, sont réservés pour les chefs de cellules, les autres dorment par terre. La porte des cellules se ferme chaque nuit, de 18h à 6h. Les besoins se font au sol, à côté des codétenus. La promiscuité est extrême. Le capita nous invite alors dans sa cellule, qui se compose d’un petit salon et d’une petite chambre. Lui n’est pas à plaindre. Un lit, une télé, et même une petite véranda dans la cour commune lui sont réservés. Je n’aurai pas accès au quartier des femmes, qui sont souvent enfermées avec leurs enfants, ni à celui des mineurs.

Nous visitons aussi la cuisine, qui permet de nourrir toute la prison. Ici chacun a droit à sa ration. Ils ne mangent pas à leur faim, mais ils mangent. En plus, la prison est ouverte et accessible pour les familles, qui peuvent en partie s’occuper de leurs proches emprisonnés. Dans la cour il y a même quelques petits étalages, des petits marchés. On m’avait décrit cet endroit comme une petite ville et s’est bien le cas. Un chef, du commerce, une Eglise, un terrain de foot. A la seule différence que les gens ne peuvent pas sortir, même s’ils aperçoivent la liberté et la ville sur les collines environnantes visible depuis la cour centrale. Mais même si ici ils ne meurent pas de faim, la promiscuité transforme un petit virus en épidémie meurtrière, l’indifférence des responsables une simple diarrhée en raison de mort. C’est sans complexe que le directeur aime rappeler aux visiteurs que cette prison est considérée comme une prison modèle en RDC, considérée comme la meilleure du pays durant l’année précédente.

Je termine ma visite au quartier spécial, où sont envoyés les malades. C’est aussi ici qu’est enfermé mon ami le docteur Claude. Ce médecin de formation croupi ici depuis plus de quatre ans. Il a été condamné pour un avortement qui a mal tourné. Homicide. Il ne sait pas quand il pourra sortir d’ici. En attendant, il se bat, pour rendre ce lieu plus humain, il est respecté et influent. Mais les années flétrissent la volonté. Nous l’aidons comme nous pouvons pour qu’il puisse exercer son métier ici. Il nous en est infiniment reconnaissant. Lorsqu’il me prend entre quatre yeux pour me donner une petite enveloppe et me souhaiter bonne chance pour la suite du voyage, je lui fais par d’une intuition : La prochaine fois que l’on se rencontrera, il sera un homme libre. Larmes aux yeux et front contre front, on se quitte, chacun chargé d’espoir et de courage.

Galerie Congo 1 – L’île de la paix

Un des premiers ballons amené par Maman et Un Seul But, il y a 4 ans
Le lieu de notre réunion, dans une école très amochée par un tremblement de terre
Comme on peut le lire sur mon visage, j’étais tout à fait à l’aise
« Pas-mal » et son vaisseau
Les gens du villages sont venus nous donner un coup de main, en portant des cartons de 40 kg sur la tête
Le laboratoire du dispensaire, je vous laisse imaginer le reste
Je voulais mettre une vidéo, mais la technologie tanzanienne refuse… Bref, notre animation à Kasihe
Maman et le directeur du dispensaire
Les rives magiques de l’île
La vue pendant la baignade
À bientôt tout le monde !
Le soleil se lève et les pêcheurs rentrent d’une longue nuit
Bukavu, les pieds dans l’eau et à flanc de montagne
Bonus : 

Transporc sur la place de l’indépendance, le plus grand rond-point de la ville
Une carte très intéressante pour comprendre l’évangélisation du continent, concernant les zones de mission des Pères Blancs dans l’Afrique des Grands Lacs
Et pour les curieux qui voudraient savoir l’arbuste dans lequel pousse les ananas

L’île de la paix

L’île de la paix

Petit repère chronologique : Ma seule deadline pour la première partie de mon voyage était d’être au Congo avant janvier. Avec maman, on avait fait en sorte de faire coïncider nos passages dans la région. Elle est arrivée à peu près une semaine après moi, le mardi 3 janvier avec notre ami Paul. L’attendre à la frontière était sincèrement surréaliste. Nos amis proches sont allés les chercher au Rwanda, et lorsqu’ils ont passé la frontière c’était une sorte de soulagement. Après un peu plus de trois mois de voyage, j’ai pu étreindre ma mère. Le moment était si émouvant que même les employés de la douane, pas toujours commodes, se sont occupés des dernières tracasseries administratives. Pour que l’on puisse profiter de ce moment. Paul a immortalisé ce moment, inoubliable. On a passé la soirée à discuter comme on aurait pu le faire dans le salon de notre maison, alors qu’on se trouvait à Burhiba. Une soirée de retrouvaille avant d’entamer le programme de ministre, ou plutôt d’ambassadrice, comme les gens l’appellent ici.

 

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L’expédition était prévue de longue date. Maman et Paul l’organisent depuis longtemps, que ce soit pour trouver où loger ou pour organiser les diverses activités du séjour. La veille du départ, Paul nous annonce que le départ n’est prévu qu’en début d’après-midi, ayant des obligations à remplir dans la matinée. La ponctualité africaine a encore raison de notre planning ; il nous téléphone à midi pour nous dire de partir comme prévu avec le chauffeur, mais sans lui. Le rendez-vous avec son archevêque a duré plus longtemps que prévu et il doit encore consacrer du temps à ses frères et sœurs. Avec maman, on sait que le voyage sera difficile, sans prêtre ou personne de renommée dans le véhicule.

Ici tout fonctionne au pouvoir. Sur la route, qui se transforme rapidement en piste après l’aéroport, nous serons arrêtés cinq fois. Des flics véreux, qui ne sont pas assez payés pour faire vivre leur famille, n’hésite pas à prendre notre 4×4 rempli de matériel pour cible. En plus, deux blancs et un jeune chauffeur ne pèsent pas lourd dans les négociations. On nous accuse de tout : transport de biens à but commercial sans licence ou autorisation principalement. Il faut toutefois savoir que cette licence est difficile à obtenir, n’existant tout bonnement pas. Eli, notre jeune chauffeur, se démène pour qu’on nous laisse partir, négocie les bakchichs et s’excuse platement devant nous. Mais ce n’est en rien sa faute et nous le remercions pour tout ce qu’il fait pour nous. En plus, les villages où nous nous sommes arrêtés n’ont pas l’habitude de voir des blancs. Les gens mendient aux fenêtres, les pauvres handicapés, parfois amputés d’un ou plusieurs membres, sont utilisés pour attiser notre pitié. Parfois ils viennent juste contempler notre pâleur, par curiosité, comme si nous étions des animaux de zoo, en cage dans leur 4X4.

Mais lorsque nous roulons, tout est agréable. Maman connait beaucoup d’endroits et de gens, si bien qu’avec Eli, ils me font une visite express de la région. On arrive finalement à Katana, puis on part à la recherche du petit séminaire de Mugeri, où nous logerons. Arrivés dans l’école des futurs prêtres, nous sommes accueillis par plusieurs amis de maman, les prélats Delphin, Crispin et le frère Claude, ainsi que par la plus belle végétation que j’ai vu dans la région. Nous déchargeons la voiture et commençons alors à organiser la journée de demain. Après une petite promenade jusqu’au terrain de foot du village, nous rentrons nous reposer au séminaire, en philosophant avec Crispin. Cet homme est très calme, on peut lire sur son visage qu’il réfléchit énormément. Il a longtemps été directeur du Grand séminaire, mais comme les prêtres sont complétement subordonnés à la hiérarchie ecclésiastique, son chef l’a muté à un autre poste du jour au lendemain. Aujourd’hui, il se prépare pour partir à Rome continuer ses études. Nous le croisons ici dans une longue retraite, afin de faire un point quant aux dernières années écoulées. L’endroit est très propice à la réflexion : c’est un petit paradis, une presqu’ile tombante dans le lac Kivu. Les bâtiments y sont entourés par la forêt, les arbres fruitiers et l’eau claire du lac. Malgré la présence de centaines d’élèves en durant les périodes scolaires, le lieu doit toujours être aussi agréable. Paul arrive dans la soirée et s’esclaffe en se remémorant le bon vieux temps avec ces collègues. Le repas est presque entièrement issu des cultures qui bordent ce lieu magnifique et apaisant.

Au réveil, nous partons à Mwanda pour notre animation du jour. Bien que de nombreuses personnes nous réclament des biens ou de l’argent, nous passons un bon moment. Le charisme et la renommée de Paul sont des outils particulièrement pratiques pour éloigner les quémandeurs. Maman organise avec nos collaborateurs un échauffement en musique, puis nous les initions au frisbee, activité qui fait son effet. Faisant appel à mes souvenirs, j’ai également préparé un entrainement spécial pour donner aux jeunes d’ici quelques techniques pour garder un but de foot. Je crois qu’ils étaient aussi contents que moi, bien que je sois reparti avec des muscles douloureux. Nous avions ensuite prévu une réunion avec les coachs partenaires, car plusieurs problèmes se sont posés avec le matériel envoyé ici. Effectivement, un des anciens entraineurs de la région a disparu dans la nature avec tout le matériel que nous lui avions envoyé. Il est certain que dans les personnes présentes à la réunion, plusieurs devaient probablement avoir des choses à se reprocher. Mais nous savons en qui nous pouvons avoir confiance et ils seront chargés de gérer la suite des affaires. Nous partons ensuite manger à la paroisse, avec certains de nos amis. L’après-midi est plus tranquille. Nous rencontrons des sœurs, dont certaines sont malades et sollicitent les mains magiques de ma mère. Ses talents pour soigner les plaies sont très connus dans la région. C’est vrai qu’elle a fait quelques miracles. Lorsque nous repartons, je demande à Paul si je peux tenter de prendre le volant de notre 4×4. Il accepte et j’accède alors à un double baptême : le volant est à droite et la piste qui sert de route n’a rien à envier à un parcours de cross. Mais je ne m’en sors pas trop mal et y prends beaucoup de plaisir, sur la route de Katana. Avant de rentrer, nous allons visiter des endroits chargés de souvenirs pour maman et pour Paul. Il a travaillé deux ans dans cette paroisse et maman y a lancé les premiers projets « d’Un Seul But ». La soirée est faite de rencontres avec d’autres amis de Paul jusqu’à ce qu’un des prêtres sorte sa guitare. Une bénédiction, ça fait deux mois que je n’ai pas pu en jouer !

Au réveil, nous sommes prêts à repartir, mais cette fois le voyage sera plus tranquille. Pas de trous, pas de police, nous partons en bateau.  Le propriétaire de cette grande pirogue est un ami de Paul qui répond au nom de « Pas-mal ». Nous chargeons donc tout notre matériel sur l’embarcation, sur laquelle un parasol a été installée pour notre venue. Le trajet jusqu’au village qui a vu grandir Paul se fait dans le plus grand calme. On file sur l’eau en agitant la main en guise d’au revoir à nos hôtes. La vue est à couper le souffle. Derrière nous, on voit l’énorme montagne volcanique du Kahuzi-Biega. C’est ici que se trouvent les derniers gorilles du Congo. Les pentes du volcan plongent à pic dans cet énorme lac de montagne, dont l’eau culmine à plus de 1400 mètres d’altitude. En glissant entre les îlots, nous nous dirigeons vers la plus grande île lacustre d’Afrique : Idjwi. Selon ses habitants, il s’agirait du seul endroit n’ayant jamais, n’a jamais connu la guerre. L’île de la paix dans une région qui saigne encore. De plus aucune mine ne s’y trouve, alors qu’elles pullulent sur les terres alentours permettant à de grandes entreprises occidentales d’exploiter les immenses ressources du sol congolais. Mon regard se perd vers le Nord, en direction de Goma, dans un infini bleu fait de ciel et d’eau. Ce voyage est magnifique, rythmé par le chant des pêcheurs au loin.

Nous débarquons à Kasihe, attendu par le frère de Paul et une multitude de cousins. Tous sont là pour nous aider à transporter le matériel. Nous dormons chez la cheffe du village : Masera, la mère de Paul. Elle connait déjà maman si bien que nous sommes accueillis comme des ambassadeurs. Mais notre temps est compté, on nous attend au dispensaire et au centre du village. A peine le temps d’avaler un ananas et nous partons commencer notre travail. Sur le chemin, le cortège qui nous suit grandi au fur et à mesure que nous avançons. Les enfants sont comme hypnotisés par les ballons colorés que nous portons avec nous. Tout le personnel du dispensaire nous attend. J’ai rarement vu un endroit aussi vétuste. Sept chambres forment l’ensemble du complexe dans lesquelles se trouvent huit lits au total. Le besoin en matériel et en médicament est énorme. La maternité est pourvue d’un lit d’obstétrique, auquel il manque un repose pied. La salle dispose aussi d’une balance. Dans la pièce où se reposent les jeunes mamans, il y a souvent de malades dans les lits voisins, ce qui représente un grand risque pour la santé fragile des nouveaux-nés. Paul connait bien l’endroit pour y avoir passé presque une année alité à cause d’une grave maladie. Ce que nous apportons est modeste, mais accueilli avec un énorme soulagement. Quelques blouses de soignant, de la literie, des linges. Mais je pense que l’espoir et le soutien moral touche aussi beaucoup de personnel : non, on ne les oublie pas. C’est eux qui se démènent pour sauver une population démunie face à de graves problèmes sanitaires. La rencontre est forte, les remerciements sincères.

Nous enchainons avec quelques animations, qui attirent tout le village sur la petite place devant l’école. Quelques jeux inconnus, quelques courses et tout le monde est heureux. Nous rencontrons aussi le directeur de l’école et quelques responsables d’équipes de foot, à qui nous donnons un peu de matériel sportif. Le directeur de l’école recevra aussi quelques livres, pour alimenter sa bibliothèque presque vide. C’est le frère de Paul qui s’assurera, dans un premier temps, du suivi de la distribution et vérifiera la bonne foi de nos partenaires. Après toutes ces activités, nous retournons chez Masera, où nous attend un magnifique festin. Je raffole des sambazas, de petits poissons frit que l’on mange en entier. En français, on les appelle des frétins. Ils sont pêchés la nuit, par une grande équipe de pêcheurs qui attachent trois bateaux ensemble, reliés par de longues tiges de bois. La proue et la poupe de ces pirogues sont prolongées par d’autres tiges, où sont accrochées des lanternes qui attirent les poissons dans l’obscurité. Paul m’explique tout cela après le repas, sur le chemin des rives où nous allons nous baigner avant la tombée de la nuit. La soirée se passe autour d’une bière et d’un dindon fumant. Nous discutons avec nos hôtes qui nous remercient encore pour notre présence. Maman dort dans la chambre de la matrone Masera, ce qui est le plus grand signe de respect. Quant à moi, Paul a voulu me laisser sa propre chambre, pour me remercier des fois où je lui ai cédé mon lit, lors de ses visites à Neuchâtel. Cet accueil fait vraiment chaud au cœur. Nous nous endormons bercés par le chant des pêcheurs.

Le lendemain est une journée de repos, un vrai dimanche. On dort le matin, puis on joue avec les enfants. C’est très émouvant de voir Paul entouré de sa famille et surtout avec sa mère. Il ne l’a pas vue depuis deux ans, ses études et son maigre salaire l’ayant bloqué longtemps en France. Le plus petit garçon de la famille est un petit ange, qui après avoir longtemps touché nos peaux de musungu, a tout fait pour attirer notre attention ou avoir des câlins. Tous les membres de la fratrie sont adorables et la journée est aussi réparatrice qu’agréable. En début d’après-midi, un énorme orage secoue notre petite île paradisiaque. Les routes sont inondées et impraticables si bien qu’il nous était impossible de rejoindre comme prévu notre prochaine destination en moto. Paul fait alors un téléphone et nous annonce que ces amis pêcheurs nous y déposerons en pirogue, une fois l’orage passé. Avant de partir, j’observe une fois de plus la bibliothèque de mon ami. Entre les livres religieux et ceux relatifs au Valais, je tombe sur un petit ouvrage intriguant. Un polar qui se passe au Cap, nommé « Zulu ». Avec comme seule lecture le Coran de mon ami Muhammad, je demande à Paul si je peux le lui emprunter, histoire de changer un peu. Il accepte en soulignant qu’il se passe qu’il se déroule dans la ville ou s’achèvera mon voyage.

Les pêcheurs nous attendent au pied de la colline qui se jette directement dans l’eau du lac. Cette fois, pas de moteur mais des pagayes. Une partie de la famille nous accompagne. J’espère sincèrement revoir ceux qui ne feront malheureusement pas partie du voyage. Nous partons alors, en agitant nos mains, direction Kashofu.

Le chant des pêcheurs est magnifique et Paul s’occupe de la traduction. Je n’ai pu m’empêcher d’enregistrer ce rythme étrange, frappé par la rencontre du bois et de l’eau. En chemin, nous sommes rattrapés par une grande pirogue surpeuplée. Certains passagers reconnaissent Paul. Ils lui expliquent alors que se sont deux équipes de foot, qui reviennent d’un match plus loin sur l’île. Le tam-tam africain fonctionnant plutôt bien, ils sont au courant de notre action de la veille à Kasihe. Ils nous proposent alors d’embarquer avec eux, car nous avons le même cap. En sautant d’une barque à l’autre, Paul reconnait certains de ces amis. Il y a des personnes de confiance parmi eux, et nous chargerons le frère de Paul de leur donner un des ballons qu’il a en réserve. Pour cette décision, nous sommes acclamés comme des héros jusqu’à ce que nous touchions terre.

Le chemin pentu escalade une colline, que la pluie a rendu glissante. Nous arrivons à destination et Paul, au fil de nos pas, nous raconte ces lieux à la lumière de ses souvenirs. C’est ici qu’il a étudié, dans la plus grande école de l’île, avec Christine qui m’a accueilli en Ouganda. C’est ici également qu’il a fait toutes les bêtises propres aux écoliers. La paroisse se trouve juste à côté des bâtiments scolaires, à côté de la grande Eglise. Nous sommes accueillis par ses amis et collègues. Après nous avoir montré nos chambres, nous nous dirigeons rapidement vers le terrain de sport qu’ils sont en train de construire, car la nuit menace. Certaines des prochains projets « d’Un Seul But » auront lieu ici, car cette île est assez démunie matériellement. Une fois rentrés, nous mangeons en écoutant les histoires de Grand Séminaire de ces prêtres ayant commencé ensemble leur vocation. Cette école à l’air d’être très amusante, malgré l’aspect strict qu’elle peut inspirer. Je discute ensuite longuement avec un prêtre ayant récemment publié un livre dans le but de dénoncer les atrocités ayant eu lieu dans la région. Nous nous promettons de garder contact. En allant me coucher, je commence aussi le livre que j’ai piqué à Paul, qui démarre en trombe.

À cinq heure, le réveil sonne. Nous partons à pied pour le port. Un vieux bateau rouillé nous attend là, avec à son bord une horde de petits paysans se rendant à Bukavu pour écouler leur production. Le bateau, plein à craquer, quitte le port en longeant un village de pygmées, entre deux épaves dont la carcasse d’acier ressort par endroit des flots. J’aperçois un petit mouvement sur l’une d’elles, ce qui donne l’impression étrange qu’elles sont habitées. Nous sortons alors de la baie, et prenons le cap pour Bukavu. Autour de nous, les pêcheurs de sambazas sortent leurs filets, tandis que le soleil vient éteindre leurs apâts. Nous filons contre le vent, le drapeau bleu du pays flotte à la proue, comme pour nous rappeler que nous quittons le paradis pour nous rendre dans la jungle de la ville.
PS: je vous prépare rapidement une petite galerie pour tout ca promis ! 

La sainte coloc’ 

La sainte coloc’ 

Mon quartier général congolais se trouve un peu à l’extérieur de la ville de Bukavu. Je réside dans la paroisse de Burhiba, avec les quatre prêtres responsables de cette subdivision. Jamais je ne pensais que la vie paroissiale avait autant de points communs avec une colocation d’étudiants fauchés. Les occupations sont presque les mêmes : chacun vaque à ses occupations et se retrouve le soir pour partager un repas. A la tombée de la nuit, les ragots de l’institution et de la communauté se partagent autour d’une bière ou deux. On regarde les infos en spéculant sur les prochains évènements politiques du pays. Des vannes pas toujours sympathiques s’échangent, rien que pour faire mousser. D’ailleurs, je pensais que les blagues sur les mamans étaient une particularité propre à mes potes. Que nenni. Il y a juste la forme qui change.

Je m’intègre vraiment bien dans cette ambiance sympa et détendue. Tous les soirs, lorsque je suis là, je retrouve le curé pour refaire le monde sur une chaise en plastique, flanquée d’un grand « Grace of God » sur le dossier. On se partage des bières. J’apprends aussi beaucoup avec l’aumônier de la police. Je discute musique avec le responsable de la pastorale des jeunes. Bref, je découvre que ces prélats sont avant tout des hommes. En plus ils sont bons vivants et leurs années d’études en philo leur a maintenu l’esprit alerte et vif. Entre les rires gras et les blagues, nous avons des discussions très sérieuses et intéressante. Il ne faut pas oublier qu’ici, tous les manquements de l’Etat sont comblés au mieux par l’Eglise. Ces hommes deviennent alors des piliers de la société et de grandes sources d’informations pour moi.

La seule vraie différence avec une coloc’, c’est la présence d’un cuisinier, d’un lavandier et d’un homme de ménage. Je pense que cette différence est significative : c’est la seule qui permet de distinguer le terme paroisse de celui de colocation.

La vue depuis le balcon, sur le lac Kivu et l’enclos des chèvres. C’est à cet endroit que doit normalement se faire la communication sur téléphone. (Nom de code pour dire boire des bières).

Le regard vide, le ventre creux

à la UneLe regard vide, le ventre creux

La première enquête d’Albert Londres, ayant fait scandale en France et plus largement dans le monde occidental, traitait du « Bagne de Cayenne ». Lorsque que je l’ai feuilleté, j’étais en partie convaincu que des atrocités pareilles ne pouvaient pas avoir lieu, cent ans plus tard. Un autre papier de ce célèbre reporter révélait les atrocités commises par les belges dans leurs colonies. C’est le fameux scandale des « mains coupés ». A nouveau, la barbarie dont faisait preuve certains coloniaux me paraissait être de l’histoire ancienne. Mais aujourd’hui, je sors de la prison de Kabare et tous mes idéaux se sont envolés. Ce bagne se situe à deux pas de Bukavu, la capitale du Sud-Kivu. Posé au sommet d’une montagne à l’entrée de la chefferie de Kabare, l’enceinte fait penser à une forteresse de brique rouge, laissée à l’abandon. Seuls les panneaux de l’entrée, annonçant de potentiels travaux, donnent l’illusion que quelqu’un se soucie encore de cet endroit.

Je m’y suis rendu aujourd’hui avec mon ami Adrien, qui est l’aumônier des prisons de la région. Il vient célébrer une messe pour les prisonniers à l’occasion du nouvel an. En effet, il a la lourde tâche de souhaiter une bonne année aux détenus. Pour toutefois adoucir ce moment difficile, Adrien et l’équipe de l’aumônerie a toutefois prévu un petit présent à distribuer à chacun des prisonniers. J’étais déjà venu dans cet endroit il y a quelques jours. Les prisonniers paient le prix fort de la gestion inexistante du pays, l’indifférence et de la corruption des pouvoirs publics. Lors de ma première visite, j’avais appris qu’aucun d’eux n’avaient mangé depuis plusieurs jours déjà. Mais Adrien, en apprenant la nouvelle, a couru acheter des haricots pour ces pauvres hommes qui purent enfin se restaurer, pour la première fois depuis 5 jours. Depuis ce repas frugal, datant de la semaine dernière, rien ne leur a été donné, si bien que pour se rendre à l’office, beaucoup ont à peine la force de se déplacer. L’endroit en lui-même est plus qu’insalubre : les 242 détenus se partagent une cour principale et trois dortoirs. La plupart n’ont pas de lit et dorment par terre, entassés les uns sur les autres. La cour sert accessoirement de terrain de football, lorsque les détenus ont la force de jouer. Ma mère et Adrien essayent par ce biais, de rendre leur souffrance un peu moins invivable. Un dortoir a aussi été fermé à cause d’une tentative d’évasion où les hommes, morts de faim, ont tenté d’enlever les briques du mur à coup d’ongles. Ils y sont presque parvenus. Il ne restait qu’une brique.

Pendant la messe, la plupart d’entre eux sont assis par terre, leurs pieds nus dans la poussière. Malgré la chorale qui donne de la voix, tente de réchauffer l’atmosphère, ces hommes regardent dans le vide. Certains n’ont même pas la force de se lever. Adrien leur offre une messe pleine de messages d’espoir, mais il est difficile de savoir si ces paroles parviennent jusqu’aux oreilles de l’audience. Après quelques minutes, un homme s’effondre. Sans s’affoler, ses voisins lui empoignent les mains et les jambes et l’emmène dans la pièce qui sert d’infirmerie. Il recevra un peu d’eau et quelques biscuits, juste de quoi le réveiller. Il sera bientôt rejoint par un autre jeune homme, s’étant lui aussi effondré durant la messe. Mais lui n’a pas la chance d’avoir un lit, il restera sur les graviers devant l’infirmerie. Lorsqu’Adrien a terminé, nous leur offrons les cadeaux. Les petits sacs contiennent du savon, du sel, du sucre et du soja. Malgré quelques visages qui esquissent un sourire, la plupart continuent à venir demander davantage. Je comprends réellement ce que l’expression « mourir de faim » signifie depuis ce moment-là. Le dernier cadeau est un sac de chou, que tous les détenus devront se partager. Il n’y en a toutefois pas suffisamment pour que chacun puisse en recevoir un. La distribution se fera à la lancée, celui qui attrapera un chou sera alors aussi heureux qu’en danger. Ici, c’est la loi du plus fort. Nous réservons toutefois deux choux pour la seule femme détenue dans ce bagne. Avec ses deux jumelles de trois ans. Ces enfants sont nés en prison et n’ont jamais vécu en dehors de ces murs de pierre. Le tribunal n’ayant trouvé personne pour les garder, elles ne connaitront jamais la liberté et l’insouciance de l’enfance mais la faim, la promiscuité et l’enfermement.

Ces gens ne sont sûrement pas des anges. Mais à défaut d’être des anges, ils restent des êtres-humains. Personne ne devrait vivre dans ces conditions. Une somme d’argent a surement dû être alloué par les pouvoirs publics à la gestion des prisons, mais elle a été détournée avant d’arriver jusqu’ici. Déjà que la vie en dehors de l’enceinte est particulièrement difficile, ici elle semble impossible. Même des enfants vivent dans cet enfer. Les seules personnes qui se battent et qui réussissent à faire survivre ces pauvres bagnards sont les membres du clergé. Sœurs, Abbés, ou simples membres de la communauté religieuse essaient de faire respecter les droits humains, de nourrir et de rendre un peu de dignité à ses pauvres oubliés. L’Etat profite, l’Eglise se débat, comme c’est le cas pour beaucoup de choses dans ce pays. Même les applaudissements et les sourires, lorsque Adrien m’a présenté comme celui qui leur amenait les ballons, le fils de Da Véro, ne me consoleront pas de la souffrance qui régnait dans cette prison et que j’ai ressenti si vivement. On m’avait prévenu que cette prison était une des plus dures du pays. Bientôt j’irai visiter la prison centrale de Bukavu, que l’on m’a décrite comme plus clémente. J’irai bientôt voir par moi-même ce que cela veut dire ici.

 

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Une des deux petites filles, qui n’a jamais connu la liberté

 

L’arrivée en terre promise 

Pour mon départ, Evode m’emmène à la station de bus et m’aide à prendre mon billet. Je le remercie encore pour tout ce que lui et sa famille ont fait pour moi ces derniers temps. Mon bus quitte Kigali à huit heure pour Cyangugu, la ville qui borde la frontière entre le Congo et le Rwanda. Du côté congolais, c’est Bukavu, sur les rives du lac Kivu. Le trajet est agréable, jusqu’à la route de montagne qui traverse le parc national de Nyungwe. Trop secoués par la conduite énergique du chauffeur, cinq passagers rendent leur petit-déjeuner par la fenêtre. Pour ma part, je discute avec ma voisine, qui vient de Goma, de l’autre côté du lac, la capitale du Nord-Kivu au Congo. Elle vient voir sa famille réfugiée ici durant les multiples guerres qui ont ravagées les régions de l’est du Congo. Nous arrivons à destination en début d’après-midi. Je me rends ensuite à la frontière en moto. À la sortie du Rwanda, un petit monsieur dont le visage m’est familier vient à ma rencontre :

– « Bonjour ! Est-ce que vous êtes Bibu ? » me demande-t-il. Un peu déconcerté je lui réponds :

– « Non, je suis Thibaud. Mais si cela peut vous aider, je suis le fils de « Da Véro ». Au moment où je prononce la version congolaise du prénom de ma maman, son visage s’illumine :

– « Haaa ! Karibu ! Je suis Dechi, c’est père Adrien qui m’envoie vous chercher ! »

Il me semblait que ce visage m’était familier, et à raison. Cet homme, je l’ai vu sur beaucoup de photos. C’est un ami de ma mère et un des chauffeurs qui travaille avec mon ami de longue date, Adrien. Nous commençons à discuter en attendant que j’effectue ma sortie du territoire rwandais. Je remarque alors que la dame devant moi me fixe avec insistance depuis quelques instants. Elle finit par me demander si je ne suis pas « Jésus ». Prenant cette intervention pour de la plaisanterie, je détache mes cheveux pour l’amuser encore plus. Loin de la faire rire, ce geste ne fit que confirmer ses soupçons si bien qu’elle dit à mon ami en swahili :

– « C’est vraiment Jésus, je dois prendre une photo pour montrer aux gens de mon Eglise que j’ai vu Jésus Christ. Je ne peux pas rester devant lui, je dois lui céder ma place, je ne peux pas passer avant Jésus. »

Mon ami me traduit ces paroles, plié en deux par cette intervention. Alors je me laisse prendre en photo, et je tente de refuser la place de cette vieille dame. Mais en vain, elle me pousse devant elle. Tout cela sous le regard amusé des témoins de cette scène plutôt coquasse. Une fois mes obligations administratives remplies, Dechi et moi partons pour le poste frontière du Congo. Avant même de pénétrer dans le bâtiment, l’atmosphère de désorganisation du pays commence déjà à se faire sentir. L’employé de la frontière semble suspicieux ma venue Congo, surtout en cette période de troubles politiques. Mais lorsque Dechi lui annonce que je viens voir le père Adrien, mon passeport m’est rendu en quelques secondes. Ici, il est nécessaire d’être bien accompagné. On embarque alors dans son énorme 4×4 s’engageant sur la route défoncée menant à Bukavu.

Premier arrêt et première rencontre. Nous sommes chez Sœur Pilar, une autre amie à ma mère. Elle souligne ma ressemblance avec ma mère, mais surtout avec ma sœur, qu’elle a pu rencontrer l’année précédente. Autour d’un jus d’ananas, cette religieuse, dont l’accent et la peau sont les seules traces de ses origines espagnoles, me demande comment se passe mon voyage. Elle est très impressionnée par mon projet que je lui détaille rapidement. Je lui raconte les grandes lignes et elle semble passionnée. Mais nous sommes pressés par le temps, nous repartons rapidement. Nous devons porter une lettre à Adrien. Je le retrouve à l’endroit où les containers envoyés par « Un Seul But » sont déchargé. Les retrouvailles sont toujours un moment fort. En plus, la dernière fois que je l’ai vu c’était cet été, lorsqu’il est venu passer quelques jours à la maison. Nous rions tellement nous sommes heureux de nous revoir. Je rencontre aussi le fameux Birindwa, gardien des containers. Beaucoup d’autres gens viennent me serrer la main, et une poignée connait maman. Je me rends compte que je n’imaginais pas la portée du réseau de connaissance de ma mère. Après quelques minutes, Adrien m’annonce que nous partions pour Burhiba, le lieu qui deviendra notre quartier général à Bukavu. La paroisse est située juste à côté de la brasserie de la ville, qui est la seule entreprise qui a survécue aux multiples conflits ayant déchirés la région de la région. Les congolais ont le sens des priorités.

Dans l’aumônerie qui sera ma maison ici, je fais encore connaissance avec des amis de ma mère l’ambassadrice. Père Sylvestre et père Richard la connaissent bien, père Pierre-Innocent peu et père Louis-Pasteur ne l’a jamais rencontrée, bien qu’ils aient entendu beaucoup de bien quant à ses actions ici. Adrien me laisse alors en bonne compagnie, ces prêtres sont pleins de vie et très drôles. Il me promet aussi de repasser dans la soirée pour organiser un peu ma semaine. Même s’il ne pourra pas tenir sa promesse, mon arrivée ici est déjà plus qu’intéressante. Je rencontre beaucoup de gens qui connaissent, respectent et admirent ma mère pour ce qu’elle fait ici. Pour ceux qui ne connaitraient pas notre association familiale « Un Seul But », je vous promets de vous en dire un peu plus très bientôt.

Mais en attendant, mon arrivée dans cette région dont on m’a si longuement parlé et qui semble si folle, surpasse la mesure de ce que j’attendais. J’ai une semaine pour infiltrer le milieu, ensuite maman sera là et tous les projets de l’asso’ se mettrons en place. Ces prochains jours s’annoncent passionnants !