Bonus safari:
Bonus safari:
Dix jours après mon arrivée à Kigoma, je me prépare enfin à aller embarquer sur la raison de ma venue ici: Le MV Liemba, un vieux bateau qui a vécu bien des aventures. Malgré la longue attente, j’ai passé un magnifique séjour au bord du lac. Pour passer le temps et profiter des rives, je suis allé me réfugier quelques jours dans un camping, un peu plus loin. J’y ai rencontré de magnifiques personnes. J’ai aussi utilisé de vieux souvenirs pour cuisiner des poissons frais du lac. Comme quoi les parties de pêches au Tessin sont toujours utiles. Le mugebuka grillé à la braise est un vrai régal.
Je suis ensuite revenu dans cette ville, qui a plutôt l’air d’un grand village. Il m’est aussi difficile d’imaginer où pouvait bien rester les milliers, près d’un million, de réfugiés ayant fui les conflits burundais et congolais. Mais les voitures du HCR sont toujours là pour rappeler que les derniers conflits politiques au Burundi sont loin d’être terminés. Il reste tout de même un camp qui compte près de 100’000 personnes, près de la frontière. Est-ce que cette Afrique des Grands Lacs sera stable un jour ? Je l’espère.
Lorsque l’heure d’embarquer approche, on se rend au port avec Justin, un américain rencontré le soir d’avant. Nous ne sommes pas les seuls musungus, comme mon père l’avait été il y a dix-sept ans. Nous sommes une dizaine, mais je suis le seul à avoir acheté un ticket seconde classe. Après deux heures sous le soleil, nous sommes enfin autorisés à embarquer. Je laisse alors les autres blancs aller sur le pont alors que je rentre dans la cale, à la recherche de la cabine numéro 4. Un employé m’intercepte et me somme de me rendre dans une autre cabine. Un seul lit y est fait, j’en déduis que j’aurai la chance d’avoir une cabine privée pour le trajet. Je suis d’une part soulagé, car je n’aurai pas surveiller en permanence mes affaires, bien que partager une cabine est souvent un bon moyen de rencontrer des gens. Le pont fera l’affaire.
Le moteur se met alors à rugir. Je regarde Kigoma s’éloigner par le petit hublot. Le bruit et les vibrations du moteur sont impressionnantes. Je comprends à ce moment-là ce qu’est de voyager sur « le plus vieux ferry du monde ». Ce bateau à tout de même été amené ici par les allemands, lorsqu’ils s’étaient accaparés la région. Originellement appelé le « Von Götzen », il avait été amené en pièces détachées, par le train, mais aussi à dos d’homme, car la voie de chemin de fer n’était pas terminée. Il a aussi été utilisé pour combattre, c’était le seul vaisseau armé du lac lors de la première guerre mondiale. Lorsque les allemands perdaient du terrain dans la bataille pour le lac Tanganyika, il avait été coulé pour ne pas qu’il tombe aux mains des belges. Mais après le conflit, les nouveaux administrateurs britanniques de la région, l’ont retrouvé puis renfloué, pour en faire un ferry. Maintenant il m’emmène vers la Zambie, près de cent ans plus tard. Je vivrai quelques jours sur un pan d’histoire. Même s’il continue de voyager à perte, aucun profit n’étant généré, le gouvernement le maintient en fonction puisqu’il représente le seul moyen d’accès à la population des rives du lac. Il n’y a aucune route terrestre qui pourrait les apprivoiser et l’économie de la région dépend de cette vieille masse d’acier.
Le voyage commence magnifiquement, avec un couché de soleil discret mais très prenant. Je me poste à l’avant, à côté de l’ancre, en observant les autres passagers. Le bateau est presque vide, ce qui le rend difficilement reconnaissable en me référant aux photos prises par mon papa 17 ans plus tôt. Les marchandises ne sont pas vivantes cette fois, les ananas ont remplacés les poules et les chèvres. Je regarde aussi les autres blancs, qui sont tous posté à l’étage supérieur de la première classe. Malgré un prix presque trois fois inférieur à ceux des non-résidents, les passagers s’entassent dans une troisième classe sale et inconfortable. Je discute quelques instants avec mon ami américain et son compagnon de cabine. Ce dernier fait un voyage assez impressionnant : il a quitté Prague en septembre et à pour but de rejoindre le Cap, à vélo. Après quelques récits de voyages épiques, je vais me coucher au moment où le bateau fait son premier arrêt. En pleine nuit, les riverains arrivent sur des pirogues, pour embarquer, où réceptionner des marchandises. Le bras articulé dépose ce qui leurs sont réservés directement dans les barques, sur les flots. Il faut préciser que la Tanzanie n’a que deux ports sur le lac. Ce spectacle incroyable sera rejoué durant chacune des trente escales.
Les jours suivants se passeront au rythme des rencontres, des parties de cartes et de paysages magnifiques. Le Tanganyika est le lac des superlatifs : le plus long du monde, le second plus profond du monde (1200m), le second volume d’eau douce le plus grand du monde. Mais pour moi il est aussi le plus beau du monde.
L’impression de troubler son calme est forte lorsque l’on fend sa surface cristalline. La nuit, les pirogues semble voler, car l’eau et l’air ne se différencient pas à la lumière d’une lampe torche.
Plus on avance, plus les rencontres se consolident. Les visages sont familiers, ils commencent aussi à s’ouvrir. Le couché de soleil du second soir sera un des plus beaux de ma vie. Le ciel s’est embrasé en même temps qu’il a enflammé l’eau.
Malgré le train de vieil sénateur allemand, nous arrivons après un jour et demi de voyage à Kasanga, l’autre port tanzanien du lac. C’est là que presque tous mes amis quittent le navire. Beaucoup d’entre eux se dirigerons ensuite vers le Malawi, où nos chemins pourraient, avec un peu de chance, se croiser à nouveau. Je continue alors en direction du terminus, avec quelques autres connaissances et des « businessmans », comprenez vendeurs d’ananas, jusqu’à Mpulungu. Ce magnifique voyage se termine déjà, je suis arrivé à l’autre bout du lac. Il est devenu très important pour moi , depuis que je l’ai observé pour la première fois, à Bujumbura. Je n’étais pas bien grand, mais déjà attiré par ce géant. Il ne me reste plus que la côte congolaise à explorer, celle que j’entrevoyais depuis le pont avant du bateau. Et explorer est un bien grand mot, je n’ai fait que regarder la partie tanzanienne. Mais ce spectacle était déjà magnifique.
Après avoir attendu que le douanier répare son ordinateur (il l’a éteint et rallumé dix fois) j’obtiens finalement mon visa et me met en quête d’un endroit où passer ma première nuit zambienne. Je trouve finalement une « guest house » pourrie, avec une chambre infestée de punaise, mais ça fera l’affaire. Avant d’aller me coucher, je vais regarder encore une fois le lac. Ce soir il se déchaine car l’orage arrive. Mais les éclairs ne font pas le poids face au bruit du moteur qui m’a bercé ces derniers jours.
Je me souviens d’un jour, où pas bien grand, j’étais tombé malade lors d’un camp organisé par mon école. J’étais tellement mal que la maitresse avait appelé mes parents pour qu’ils viennent me chercher. Mon père était alors venu. Sur la route qui me ramenait à la maison, je ne sais pas comment, mais on avait abordé le sujet de son voyage en Afrique. Ce jour-là, mon imagination s’était laissée bercer par des histoires de voyages en bateau sur un lac immense, d’explorateur, de singes et de crocodiles et d’un vieux train. Je crois que c’était la première fois que je m’intéressais vraiment au voyage qu’il avait réalisé avec son journal, pour marquer le passage à un nouveau millénaire. C’est, à mon souvenir, la première fois que l’Afrique me faisait rêver, en dehors du Roi Lion évidemment.
Depuis quelques jours, je voyage dans l’environnement de ce rêve. D’abord dans le vieux train colonial qui me permettra de relier Dar es Salaam et Kigoma. Vieux est un petit mot pour décrire cette antiquité. Bien qu’il ne fonctionne plus au charbon, comme à l’époque de sa construction par les allemands, et les dernières technologies qui y sont embarquées datent des années 70. Lorsque j’ai réservé mon billet, j’ai demandé quand est-ce que nous allions arriver à destination. La réponse fut aussi vague qu’étonnante : Dimanche. Ici, un voyage est une activité à part entière, incertaine. On ne prévoit rien d’autre que le voyage. Je commence à m’y faire. Le départ est prévu vendredi après-midi. Je rejoins alors mon wagon de seconde classe. Il est équipé de six couchettes, qui peuvent se transformer en siège durant la journée. Je voyage avec un vieil homme nommé Johnatan, qui a de la peine à se déplacer à cause de son âge. Il parle bien anglais et la conversation est agréable. Le train se met alors en route pour l’extrême Ouest du pays, à 1200 km d’ici. Lors du départ, tout le monde passe la tête par la fenêtre, qui ont presque toutes été remplacer par des planches de bois. Doucement, nous nous éloignons des tours de la ville portuaire.
Le train avance à un rythme de sénateur. En discutant avec un des employés de la compagnie, j’apprends que sa vitesse de pointe est de cinquantes kilomètres par heure. À cause de la voie très vieille ainsi que du mauvais entretien des rails. D’ailleurs, il tangue davantage que le bateau qui nous amené à Zanzibar, Alex et moi. On s’arrête régulièrement dans des hameaux décrépis. J’apprends leurs noms en dépassant les vieux bâtiments coloniaux qui servent de gares. La première nuit est calme, malgré les secousses.
Johnatan me réveille au petit matin, car nous arrivons à Dodoma. Une capitale aux airs de villages. Tout est à taille humaine et parait accueillant. Sur le chemin du prochain aiguillage qui fonctionne encore, nous traversons la savane. Ce paysage contraste avec la côte, et l’air y est bien plus frais. Je respire enfin, après la fournaise. Dans un des hameaux, le train reste plus longtemps et les habitants semblent au courant, car tous sont aux bords des voies. Ils préparent à manger pour les voyageurs afin de tirer un petit avantage de ce train. D’autres villages vendent du miel, du lait ou ce qui se fait dans les alentours. A Tabora, le train se sépare. Une partie ira jusqu’à Mwanza, sur les rives du lac Victoria. Je reste dans celle qui continue à Kigoma, et le lac Tanganyika. La seconde nuit se passe aussi calmement que la première. Je suis à nouveau réveillé par Johnatan qui me dit de préparer mes affaires, car nous sommes presque arrivés. Mais je reste accroché à la fenêtre du couloir, d’où j’aperçois le lac Tanganyika. J’attendais ce moment depuis plus de sept ans. Lorsque tout le monde est sorti, je prends mes affaires et me met à la recherche de mon hôtel.
Je fais à Kigoma la connaissance de deux Belges, avec qui je passerai mes premières journées. Ils se rendent au Burundi d’où leurs vols retour partira. Lorsqu’ils s’en vont, je commence à préparer la suite de mon voyage.
Mon père m’avait parlé d’un vieux bateau, je dois vérifier s’il est toujours en service. Il est très connu dans la région et j’apprends vite qu’il est encore à flot. Je trouve alors le guichet et j’apprends qu’il partira mercredi de la semaine suivante. Bien que cela implique pour moi de séjourner longtemps dans les envions, j’avoue ne pas être déçu car je me sens bien ici.
Aujourd’hui, j’ai décidé d’aller visiter le musée du Dr.Livingstone que j’avais vu sur ma carte. Mon père m’avait dit que cet endroit valait le détour. Je prends alors une moto, jusqu’à Ujiji. Je marche ensuite jusqu’au fameux musée, pour être accueilli par un vieil homme, et la suite se passe exactement comme mon père l’avait écrit il y a dix-sept ans. (Article à la fin de la page).
Govola est toujours le gardien et guide du lieu. Il fait toujours assoir ces visiteurs sur les trois mêmes bancs en pierre, sous les manguiers, issus des boutures de ceux qui ont vu Stanley retrouver le missionnaire. Les statues de papier maché tendent toujours leurs chapeaux aux quelques visiteurs qui viennent leur rendre visite. Les tableaux sur les murs ont toutefois été agrémentés des quelques informations concernant la traite des esclaves en partance de ce village et les objets de la culture traditionnelle de la région.
Lorsque je sors du musée, je me dirige vers la plage. L’horizon est si interminable si bien qu’on ne peut pas apercevoir la rive opposée. Quelques pêcheurs viennent à ma rencontre. On échange avec les peu de mots que chacun connait, entrecoupés de grands éclats de rire. Lorsque je retourne vers la route principale, l’idée que mon père soit passé sur les mêmes chemins pavés il y a quelques années à quelque chose d’irréel. Entre une mosquée et une église, je me rends compte que j’ai fait le même trajet que Stanley, lors de sa quête pour trouver l’illustre explorateur et le trajet inverse de centaines d’hommes qui ont été déportés pour être vendus. Mais surtout, je remonte le chemin qu’à fait mon père il y a 17 ans. S’il ne m’avait pas ouvert le chemin, je ne serais assurément pas ou je suis maintenant. C’est cette aventure qui a surement été un élément essentielle de notre première venue familiale en Afrique, et indubitablement celle de ce voyage. En attendant de pouvoir monter dans le plus vieux ferry encore actif au monde, la région a encore beaucoup de rêves d’enfant à me faire découvrir.
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Il y a des jours où tu n’as envie de ne rien faire. La force te manque et tu restes cloitré dans une chambre d’hôtel. La seule chose qui tourne rond est le ventilateur du plafond, réglé sur le mode hélicoptère à cause de la chaleur. Il y a des jours où tu te demandes ce que tu fous là, seul, alors que ta chérie est rentrée quelques jours plus tôt. Tu cherches quelques informations, entre deux siestes, tu sors pour te donner bonne conscience. Il y a même des jours où tu te demandes ce que tu fous là, tout seul à Dar es Salaam. Presque à remettre en question le rêve que tu as la chance de vivre.
Et après ces jours comme ça, il y a un jour où tu ne sors que pour chercher à manger. Tu vas au resto que tu connais, bon et pas cher. Mais il est fermé, alors tu te mets en quête d’un autre tout aussi bon marché, car autant économiser un peu d’argent pour la suite. Tu trouves alors un indien qui ne paye pas de mine et tu feuillettes mollement la carte pleine de graisse. En attendant ton assiette, une famille arrive et est obligée de se séparer en deux groupes, car tu as pris la dernière table. Alors tu te lèves et tu leur propose ta place, comme ça ils peuvent au moins manger ensemble. Etonnés et reconnaissants, ils acceptent et tu t’assieds alors à la même table qu’un père et son fils. Après quelques regards amicaux, la conversation se lancent et tu remarques, malgré ton envie d’être tranquille, que tu peux l’être en discutant avec des inconnus. Chacun parle de sa vie, rien que nos différences culturelles sont intéressantes. Avec eux et leur ouverture, tu refais le monde. Le jeune garçon est très fier d’utiliser les quelques mots de français qu’il a appris à l’école. Eux te parlent de leur pays d’origine, l’Inde, moi de la neige suisse. Puis le petit, particulièrement curieux, me demande si le réchauffement climatique se fait aussi ressentir dans mon pays. Je lui explique rapidement les effets qu’on peut observer, tout en étant énormement admiratif de ce petit gars de 10 ans. Il n’y peut rien, mais il est très triste et coupable de penser qu’à cause des hommes, la terre et ses cycles sont en train de changer. Puis, dans la discussion, tu prends la serviette de la table pour inscrire ton adresse mail, et tu plies consciencieusement l’adresse inscrite sur l’autre serviette que le père me tend. Avant de terminer le repas, l’homme fait encore par de son inquiétude concernant le climat politique actuel. Il a peur de Trump, de ces idées, de ces déclarations. Il voudrait voir un monde ouvert, un monde où son fils pourra se considérer comme un citoyen du monde. Cette phrase il l’a dit, l’œil brillant et le regard fier. Ne t’inquiètes pas Debdas, ton fils est sur la bonne voie. Au moment de se quitter, il se dirige alors pour régler l’addition et est étonné que j’ai déjà payé mon plat. Il me dit qu’il aurait voulu me l’offrir. Touché, je le remercie, mais surtout pour cette rencontre, dans ce resto qui paye pas de mine.
Il y a des jours où tu remercies le hasard, de tout ce qu’il a mis sur ton chemin, pour arriver à des moments comme celui-là. Tu te dis peut-être que t’avais besoin de rien faire, digérer les derniers événements, te remettre dans le bain. Il y a des jours où quand tu en as le plus besoin, il arrive quelque chose pour te rappeler ce que tu fous ici et la chance que tu as. Il y a des jours où tu te dis que ce n’est pas arrivé pour rien.
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Il manque une partie du voyage, mais je n’ai pas encore écris le passage concernant Zanzibar. Il viendra plus tard et les publications vont continuer, j’essaye de rattraper mon retard comme je peux.
Juste encore à noter, l’image est prise à une autre endroit, mais j’ai trouvé qu’elle allait très bien avec l’article. C’est le pont qui relie l’île de Mozambique avec le continent. C’est rare de le voir comme ça, car normalement le temps est magnifique ici.
Encore désolé pour ce retard et à bientot !
Thib
Après notre super escale à Moshi, il est temps de nous diriger vers la station de bus. Nous partons pour Tanga, une petite ville au bord de l’océan indien, au nord de Dar Es Salaam. Nous attendons notre bus pendant plus d’une heure et demie avant de pouvoir embarquer. Durant le trajet, nous observons les paysages changer. À l’approche de l’océan, la végétation devient plus luxuriante, les palmiers sont de plus en plus nombreux et la végétation beaucoup plus verte. Nous sommes tout excités et nous réjouissons d’arriver à destination : ce sera la toute première fois que nous verrons l’océan indien. Après quelques arrêt et un changement de pneu, notre bus arrive à Tanga. Nous cherchons notre hôtel qui s’avère être un magnifique bâtiment colonial, certes aujourd’hui plutôt décrépi, mais à quelques pas de l’océan. Les plafonds, hauts de plus de 3 mètres, les pièces immenses, les moulures et les boiseries nous plongent dans la période coloniale, ou rien n’était trop beau ou trop grand pour les colons. Mais le peu d’entretien de cette bâtisse, sûrement faute de moyens, la transforme en ombre d’un passé encore bien présent dans cette ville qui fut utilisée or les allemands comme capitale de leur « Afrique Orientale ».
Le lendemain, nous décidons d’aller nous promener dans la ville. Contrairement à ce à quoi nous nous attendions, il s’agit plutôt d’un grand village dans lequel de nombreuses petites échoppes se font face. L’ambiance des rues est très agréable, très tranquille en fait. Bien que ce ne soit pas une ville très touristique, nous ne sommes que très peu sollicités par les marchands et de nombreuses personnes nous saluent. Beaucoup de gens se déplacent à vélos ce qui donne à la ville un air de station balnéaire.
Nous sommes aussi frappé par l’architecture de la ville. Tel un patchwork, il est possible de voir, dans la même rue, un temple hindou, une école coranique et un dispensaire chrétien. De nombreux bâtiments coloniaux tombant en ruinent bordent les avenues, entourés de petites baraques en tôle construites récemment. Cette diversité se retrouve aussi au sein des habitants. De nombreux indiens vivent ici, certaines femmes portent le voile, d’autre non, des hommes portent le bonnet musulman, alors que des croix et des chapelets sont accrochés au rétroviseur de la voiture de certains. Tout le monde se salue, se respecte. Aucune animosité n’est palpable, le tolérance et le respect semblant être la norme ici.
Après notre promenade citadine et un repas bien mérité, nous allons marcher sur les rives de l’océan. Après avoir traversé un marche au poisson, simplement constitué de tables en bois sur lesquelles reposait la pêche du jour, nous arrivons au bord de l’eau. Les petits bateaux de pêcheurs dansent au gré des vagues dans cet océan bleu profond parsemé de déchets. Nous trouvons un banc de fortune sur lequel nous nous asseyons et contemplons le paysage. Le moment est magique et très émouvant.
Nous repartons en direction de notre hôtel, des images plein la tête et le coeur confiant. Cette belle expérience à Tanga touche à sa fin. La sérénité et le calme que nous y avons trouvés nous aideront sûrement à affronter notre prochaine destination dont on nous a déjà beaucoup parlée : Dar es Salaam!
Écrit par Alex’
Après quelques heures de bus, nous arrivons à Arusha. Cette ville nous a souvent été décrite comme accueillante et sympathique. Pourtant, à peine sortis du bus, les « flycatchers » commencent leurs assauts. Ces gens sont employés pas les compagnies de safari pour trouver de potentiels clients qui n’auraient pas encore réservé le leur. Car cette ville est le point de départ de la plupart des expéditions de Tanzanie et ce business est plus que florissant. Après avoir envoyé bouler plusieurs de ces personnes, nous arrivons finalement à notre auberge. Après un peu de repos, nous sommes tout de même contraints de retourner dans la fosse aux lions, car nous n’avons rien réservé et il est impensable de passer ici sans aller voir les merveilles des alentours. C’est alors que notre chance se remet à fonctionner ; à la sortie de l’office de tourisme le plus inutile du monde, et je pèse mes mots, un jeune homme nous aborde. Il a l’air plutôt honnête alors nous décidons de le suivre. Après quelques minutes de discussion dans son agence, nous signons, sans engager d’argent à ce stade, pour partir avec eux le lendemain, car la concurrence ne fait pas le poids.
Nous nous embarquons pour le parc de Tarangire aux aurores, dans un énorme 4×4 qui nous est réservé. Alex ne tient pas en place et la première giraffe que nous apercevons est un événement ! Notre guide nous assure à 99% que nous verrons des éléphants. Il s’avère que ce chiffre ne sera qu’une estimation du nombre de pachydermes que nous apercevrons. Bref, nous sommes servis, entourés par une myriade d’animaux qui se retrouvent en ce moment autour de la rivière Tarangire. Cest le seul point d’eau de la région lors de la saison sèche. Malgré le fait que nous n’avons pas vu de félins, nous sommes aux anges jusqu’au moment du retour. Même le larsin d’une partie du repas d’Alex par un petit singe n’enlève rien à la magie, au contraire. Le temps et notre budget ont limité l’expédition à une journée, qui s’avérera suffisante. Quant à Arusha, à par la surprise de la vue magnifique sur le mont Meru, nous sommes un peu déçus compte tenu de nos attentes. Alors nous ne nous attardons pas et décidons de continuer la route jusqu’à Moshi, la ville au pied du Kilimanjaro.
Dans la précipitation de la station routière, nous montons dans le pire bus de notre voyage. Le trajet ne devait pas durer plus de deux heures, mais comme ce bus n’avance que lorsqu’il est plein, si bien que nous mettrons plus de quatre heures longues et inconfortables pour rejoindre notre destination. À notre arrivée, nous cherchons en vain l’auberge réservée le soir précédant. Il s’avère que mon application n’est pas à jour et qu’elle nous indique l’ancien emplacement de l’établissement. Un commerçant indien nous indique alors une porte, et en haut des escaliers, un jeune homme souriant nous explique la situation. Il vient d’acquérir les locaux de l’ancienne auberge, mais les travaux ne sont pas terminés et officiellement, ils ne sont pas encore ouverts. Sur ce il nous propose tout de même de loger dans une chambre terminée pour le même prix que notre réservation initiale. Soulagé et surpris, nous acceptons. Plus tard, en ressortant dans la rue, nous cherchons des yeux le plus haut mont africain. Mais Le ciel est couvert et il nous est impossible d’en voir la cime. En rentrant avec quelques achats, nous apprenons que l’employé de l’hôtel s’avère être un guide qui a escaladé le monstre plus d’une cinquantaine de fois. En sirotant des bières aux noms évocateurs tels que « Kilimanjaro » et « Serengeti », il nous propose de nous amener au meilleur point de vue de la ville demain à l’aube, avant que le géant ne se coiffe de son chapeau vaporeux.
Observer le plus haut sommet du continent depuis un décor urbain est une expérience très intéressante. Loin des paysages décrits par Joseph Kessel dans son roman « Le Lion », nous observons l’ancien volcan avec des yeux impressionnés. Même si loin, la montagne semble immense, indomptable. Comment le gars qui nous accompagne a-t-il pu le gravir cinquante fois ? Sur le chemin du retour, il nous explique qu’il ne faut pas monter plus de deux fois par mois. Rien que ça. Nous nous accordons alors un peu de repos avant de partir à la découverte de la ville. Ce que nous attendions d’Arusha, nous le trouvons ici. Les gens sont accueillants, le marché splendide, et les « flycatcher » nous laisse plutôt tranquille. Nous passons une magnifique journée, en dégustant les fruits ramenés du marché et ce petit break bien mérité. On en profite pour planifier le reste du voyage et notre prochaine destination sera la ville côtière de Tanga, très proche de la frontière kényane. Ce sera notre premier contact avec la côte swahilie. Mais ce n’est pas la plus grande découverte que nous partageons là-bas, car ce sera pour nous deux la rencontre avec l’océan indien.
Nous arrivons à Singida de nuit, notre bus ayant pris du retard durant le trajet. Nous descendons dans une station bondée d’hommes éméchés et plutôt insistant. Cette situation est impressionnante, mais le chauffeur du bus nous aide à trouver un conducteur de tuk-tuk à même de nous conduire jusqu’à l’hôtel que notre petit guide de poche conseillait. Par chance, le veilleur de nuit nous accueille très chaleureusement. Nous sommes heureux de pouvoir enfin nous reposer après 10 longues heures de bus. Toujours aussi prévenant, le vieil homme nous fait visiter plusieurs chambres et bien que le prix soit un peu plus élevé, nous nous offrons une chambre avec une douche, chaude de surcroit. Nous nous couchons épuisés mais très agréablement surpris par la gentillesse du personnel.
Le lendemain, nous nous réveillons avec les rayons du soleil qui filtrent au travers des rideaux de fortune accrochés aux fenêtres. Le petit déjeuner est copieux et termine de nous remettre d’aplomb pour partir à l’aventure. Nous avons lu que Singida se trouve au bord d’un lac du même nom, sur lequel de nombreux flamands roses viennent faire escale lors de la période migratoire. Nous nous mettons donc en route, très excités de le découvrir. Sur le chemin, les sourires, les petites discussions informelles, les regards bienveillants et les signes de la main sont nombreux. Cette ville, dont le soleil fait scintiller les toits de tôle, nous apparaît alors encore plus chaleureuse. Deux hommes en qamis nous accostent, nous voyant nous promener au milieu des maisons dépravés : « What are you doing ? » s’exclame l’un d’eux. Nous lui expliquons que nous allons voir le lac si bien qu’ils s’empressent de nous montrer par quel chemin il est le plus judicieux de passer. Les poignées de main sont franches et les sourires sincères. Quelle belle découverte que Singida !
Arrivés au bord du lac, le paysage est saisissant : d’énormes pierres parsèment les rives turquoises alors que le soleil fait briller le feuillage des arbres. Nous décidons de nous promener le long de l’eau, en espérant voir ces fameux flamands roses ! Après 1h30 de marche environ, nous nous arrêtons net : ils sont là ! Ce spectacle n’est même pas gâché par nos pieds qui s’enfoncent dans le sable mou sous lequel dort une sorte de limon très noir qui marquera nos chaussures. Nous nous baladons encore un peu et nous approchons d’un amas de gros cailloux polis, sur lesquels bronzent des lézards à la tête rouge et au corps entièrement bleu. Il y en a partout ! Des étoiles pleins les yeux, nous faisons toutefois demi-tour pour retourner au village. Nous avons marché plus de 3 heures et nous commençons à avoir faim ! Après quelques mais grillés, nous essayons de trouver un magasin de données internet. Le vendeur est très aimable et son patron encore plus ! Nous commençons à discuter de tout et de rien, du système politique suisse, des problèmes récurents sur le continent africain, de nos études… Deux heures plus tard, c’est dans le tuk-tuk que le gérant de l’échoppe à lui-même négocier pour nous que nous retournons à l’hôtel, définitivement séduit par Singida.
Le lendemain matin, nous demandons au personnel de l’hôtel s’il est possible de faire notre lessive. C’est très amusées et surprises que les femmes de chambre observent Thibaud, un homme et qui plus est blanc, laver à la main ses vêtements. Le soleil est si chaud qu’en quelques heures, tous nos habits sont secs. Et heureusement, car il est déjà l’heure de repartir. Prochaine destination Arusha !
Écrit par Alex’
Après la nuit dans l’hôtel rouge fluo, nous nous levons aux premières heures pour passer la frontière le plus tôt possible. Il nous reste encore un détail à régler : Y a-t-il un bus pour nous emmener à notre prochaine destination. Il faut bien avouer que cette destination n’est pas encore définie. Des gens nous ont recommandés de passer la nuit à Kahama, ville depuis laquelle rejoindre Arusha devrait être possible. Nous partons alors aux aurores et pour une fois, nos avis divergent. Je propose de partir à droite et Alex à gauche. Nous finirons par suivre un vieil homme, qui donne raison à Alexandra. Le poste frontière est plutôt impressionnant. Entouré de grands barbelés, avec une route surveillée par une armada de caméras. Mais le comportement des locaux démystifie vite l’aspect infranchissable de ce passage. Des enfants jouent au sautant les barbelés, qui sont alors pliés et cassés par endroits. D’autres gens vont puiser de l’eau, en empruntant un chemin très informel, qui transperce la frontière.
Au bout de cette route se trouve le poste frontière tanzanien. Le visa nous est donné très facilement et cela fait un bien fou ! Alors que nous nous informons du taux de change en vigueur, un homme souriant nous aborde en nous demandant notre destination. Nous lui confions que nous voulons nous rendre à Arusha, sans savoir où faire escale. D’un rire malicieux, il nous répond en français : « Je suis votre homme, je travaille pour la compagnie de bus qui relie Kigali à Dar es Salaam. Personnellement je vous conseille d’aller jusqu’à Singida, passer la nuit et continuer le lendemain. Allez juste prendre votre ticket dans le village de l’autre côté de la frontière et on se voit dans une heure ». Notre chance incroyable a encore frappé. Quelques minutes plus tard, notre ticket en poche, nous embarquons dans le bus. A nouveau, la seule indication sur notre heure d’arrivée est : « ce soir ! ». Le trajet est aussi très intéressant, les paysages sont incomparables à ceux du Rwanda. Nous sommes vite transposés dans la savane. La télévision du bus joue plusieurs hits de la région, ainsi que des clips dans la mouvance internationale actuelle. Mais le plus intéressant sont les films qui nous sont proposés. Même si ils sont sous-titrés, il est presque impossible de comprendre la trame. A nos yeux, l’absurde des situations rend le moment assez hilarant.
Le trajet est le plus long qui nous a été donné de faire tous les deux. 700 kilomètres en une journée. Avec quelques bananes et un petit repas en fin d’après-midi, nous arrivons épuisés dans cette ville complétement inconnue. La nuit, les stations de bus peuvent être plutôt anxiogènes. Entre les racolleurs aux yeux vitreux, nous nous fraillons un chemin jusqu’à un tuk-tuk et nous réfugions dans le seul hôtel présent dans notre guide de voyage. Finalement, le gardien de nuit nous amène dans une chambre munie de toilettes et d’une douche, chaude qui plus est. L’hôtel « Stanley » est un endroit plutôt accueillant, qui nous permettra de nous requinquer avant d’aller visiter notre première ville tanzanienne. Nous n’en connaissions même pas l’existence et la surprise s’annonce de taille.