Les retards ont aussi du bon

Voilà, mon séjour à Khartoum est déjà terminé. J’ai sincèrement l’impression que tout est allé très vite et que mon séjour ici était trop court. Mais je me suis promis de revenir, et de ne pas me limiter qu’à la capitale la prochaine fois. Avec l’aide d’Alexandra, j’ai réservé un vol pour Nairobi il y a quelques jours. Sans aide extérieur, il m’aurait été impossible de quitter le pays, ma carte de crédit n’était pas acceptée sur le domaine internet ainsi que sur le territoire du Soudan. J’ai aussi fait attention à prendre un vol me permettant d’arriver tôt dans la journée à Nairobi, histoire de ne pas me perdre dans cette jungle urbaine.

Le matin du départ, je n’ai qu’à préparer mon sac, puis à aller dire au revoir à Thabi qui dort encore. Je croise aussi mes amis entraineurs de volley venus suivre une formation ici au Soudan. Le soir d’avant, j’ai passé pas mal de temps à discuter avec l’un d’eux. Il s’appelle Junior et est originaire du Cameroun. Il maitrise très bien le français, ce qui était très agréable pour moi. Avant de les quitter je nous remémore son visage lorsque je lui ai appris que la bière était illégale ici. On rigole une dernière fois et on se promet de se revoir un jour à Yaoundé, ou en Suisse. Etant le statisticien de l’équipe de volley féminine camerounaise, peut-être sera t’il amené un jour à visiter la Suisse ! Quoi qu’il en soit, nous resterons en contact.

Je prends alors mon sac et me dirige à pied vers l’aéroport, qui est à deux pas de mon auberge. A nouveau, la plupart des accès sont bloqués par des dispositifs de sécurité. Mais je trouve relativement facilement ma route. Je montre mon billet à l’entrée et passe le premier contrôle. J’essaye alors de changer le reste de mes livres soudanaises, mais le discours est malheureusement le même que celui entendu à Assouan. La seule monnaie disponible est celle que j’essaye de changer. Je laisse vite tomber, c’est peine perdue. Heureusement que j’ai prévu beaucoup d’avance, car lorsque je me présente à l’enregistrement des bagages, le guichetier m’annonce que j’ai une semaine d’avance. Et oui, lors de l’achat du billet, on s’est planté d’une semaine. Le guichetier me rassure : j’ai suffisamment de temps pour aller changer de billet avant que le vol du matin pour Nairobi ne décolle. Mais il faut déjà trouver le guichet en question, et avec quatorze kilos sur le dos, se dépêcher n’est pas la chose la plus facile. J’atteins finalement le bon bureau pour y trouver un jeune homme nonchalant à souhait. Mais à ma demande, il va chercher son supérieur, qui lui changera mon billet en moins de dix minutes, moyennant le paiement d’un petit supplément. Moi qui cherchais à me débarrasser de quelques livres, j’y suis en partie arrivé. Je retourne alors à l’entrée de la zone de départ et me rends tranquillement jusqu’au hall d’attente.

Je sympathise alors avec un guide touristique canadien établi en Ethiopie et une américaine ayant travaillé aux Nations-Unies. Pendant la conversation, les passagers de tous les vols de la matinée sont appelés, mais pas de nouvelles nous concernant. C’est alors qu’entre en scène mon ami du bureau. Il vient vers nous la mine tendue et nous annonce que le vol aura au minimum trois heures de retard, à cause d’un problème technique. Parfait, on est tous sûrs de rater notre correspondance, mais au moins on est une bonne équipe ! On m’assure que j’aurais une place dans le vol du soir, mais mon ami guide lui est dans une mauvaise posture. Lui et son groupe de vingt personnes devaient se rendre à Djibouti, qui n’est desservi que par un seul vol par jour depuis Addis. Ils devront passer la nuit dans la capitale et perdre une journée sur leur planning. L’avion aura quatre heures trente de retard finalement.

On arrive à Addis de nuit. Les derniers rayons de soleil nous ont permis d’observer depuis le ciel le lac Tana, la source du Nil bleu. Les lumières de la capitale sont hypnotisantes et ma seule envie lorsque je suis dans l’aéroport est de sortir et de rester quelques temps ici. Mais ce sera pour une prochaine fois. A noter aussi qu’à la sortie de l’avion, j’ai vraiment eu froid. C’est une sensation que j’avais presque oubliée mais qui est vraiment agréable après la fournaise du désert. Je me mets alors en quête d’un billet pour le prochain vol en partance pour le Kenya. Un des employés m’indique la mauvaise direction et à mon retour, je me retrouve dernier de la file. J’attends ici quarante-cinq minutes avant d’être pris en charge, mais ma patience est récompensée car j’obtiens la dernière place du vol. Un autre européen avec qui j’ai échangé deux mots quelques minutes plus tôt me demande si je vais à Nairobi. Il m’invite alors à boire une bière avec lui une fois mon attente terminée. Je le retrouve alors, mais je suis épuisé. Je me dis qu’il sera difficile d’enchainer maintenant une conversation en anglais avec un natif. Mais il s’avère qu’il parle français à la perfection, sa mère venant de Chambéry. Lui a grandi en Irlande et est maintenant basé à Nairobi. Il bosse pour MSF et était en mission de trois semaines au Darfour. La conversation est très intéressante et son expérience de l’Afrique vraiment bienvenue. Il me donne des conseils très précieux sur Nairobi et le Kenya. La bière que nous dégustons semble être une libération pour lui, en ayant été privé pendant tout son séjour. Il me fait alors penser à mon ami Camerounais. Il m’offre toutes les consommations de la soirée, sous prétexte « qu’il sait ce que c’est d’être étudiant », le tout suivi d’un petit clin d’œil.

Le vol jusqu’à ma prochaine destination se déroule sans encombre. A mon arrivée, j’obtiens facilement le visa que je convoitais deux semaines plus tôt à l’ambassade des dormeurs. Il me permettra de me déplacer librement pendant 90 jours, au Kenya, mais aussi en Ouganda et au Rwanda. Si tout semblait compliqué ce matin, tout roule le soir même. Lorsque nous attendons nos bagages, Philippe me propose de se partager le prix du taxi. En effet, mon auberge est sur la route de son appartement. Moi qui voulait arriver de jour pour me faciliter les choses, cette arrivée de nuit est bien plus agréable que ce que j’aurais pu connaitre de jour mais en me débrouillant seul. Mon ami négocie le prix du taxi, me donne quelques derniers conseils concernant la ville sur le chemin de l’auberge et me tend sa carte de visite, que je puisse le contacter en cas de coup dur. Une fois de plus, je ne sais pas d’où tombe toute cette chance.

J’arrive à deux heures du matin au gite dans lequel j’ai prévu de rester quelques jours et sympathise rapidement avec le gardien de nuit. Lorsque je découvre un lit douillet et une chaleur supportable dans la chambre, c’est la libération. Je pourrai dormir pour la première fois depuis le début de mon voyage avec une couverture qui ne sera pas inutile. Avant de sombrer dans les bras de Morphée, je me demande encore d’où peut provenir toute cette chance ? Est-ce juste un hasard ? Où la magie de l’Afrique ? Où peut-être celle du voyage ? Je n’en sais absolument rien et je me le demande encore maintenant alors que j’écris ce texte. Mais vraiment, que c’est bon ce genre d’aventure !

 

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